jeudi 24 juin 2010

Les chroniques de Saint Jean

Si je reste trente secondes de plus dans mon lit, je sens que mon cerveau va imploser. Ma tête veut se lever, mais mon corps est cloué aux draps. J'ai l'impression que mon cœur bat dans ma boite crânienne. Mon bras droit, qui semble peser trois tonnes, repousse la couette. Je me dresse sur le lit, pose mes pieds sur le tapis Ikea. Ma chambre est une toupie recouvertes de posters de Kill Bill et Jimi Hendrix.

Hier se célébrait la Saint Jean à Barcelone, sur la plage. J'espérais ramener une déesse suédoise, mais tout ce que j'ai rapporté, c'est du sable. Des pelletées de sable; je ne sais pas si je suis dans ma chambre ou à la Barceloneta. Ma bouche est toujours en pleine guerre civile. Ma langue, encore imbibée de tequila, lutte contre mes lèvres et leur relent de vodka. Chaque front défend son gout et son odeur de façon inébranlable. Je déclare l'armistice en buvant un demi litre d'eau.

Aujourd'hui est une journée comme ça, où avant d'ouvrir les rideaux, on prie pour qu'il fasse gris; pas de chance, je suis en Espagne. Le soleil me jette à la figure ses torchons de lumière. C'est dans ces moments là que la brume anglaise me manque. Je déambule vers la cuisine où m'attend le chaos apocalyptique d'après soirée. On laissera la vaisselle pour quand la lucidité nous aura reconquis. Le frigo me nargue. Il me rit au nez. Je le regarde longuement, dépité. Dans mon espace, un bout de fromage déprimé me fait penser à un enfant qui joue seul dans le jardin parce que ses parents ne veulent pas lui donner un petit frère.

Aujourd'hui est une journée comme ça, où tous les choix sont difficiles. Toutes les décisions sont le résultat dilemmes complexes. Que vais-je manger? Sucré? Salé? Ai-je faim ou soif? Lire sur le balcon ou regarder un film? Aller prendre l'air ou faire la sieste? Me doucher maintenant ou plus tard? L'indécision et le doute gangrènent toutes mes idées

Aujourd'hui est une journée comme ça, où on a l'impression de porter des moufles pour tout. Couper mon steak devient une entreprise délicate. Séparer les pages du journal pour les tourner, équivaut aujourd'hui à escalader l'Everest pieds nus. Envoyer un texto n'est pas évident quand vos doigts sont des spaghettis cuits. Dans la série "je suis un bon à rien", l'épisode de la douche vaut aussi le détour. J'ai l'impression d'être dans une toilette d'appoint -comme celles sur les chantiers- qu'un géant secoue de toutes ses forces. Le savon a un gout de sangria et la stabilité brille par son absence.

Aujourd'hui est une journée comme ça, où dans mon journal le mot "glande" occupera l'espace comme une prison au milieu d'un désert. Une journée où regarder les oiseaux par la fenêtre devient l'activité la plus excitante et où le mot "resaca" prend tout son sens.


1 commentaire:

  1. en gros tu as eu la gueule de bois... Bon a quand un recueil avec tous tes textes?

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