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Maybe on peut aller au Delirium?"; "
Otherwise y'a la rue des Pittas". Signe d'arrogance? De "J'me la pète, je parle plus français"? Non (je ne l'ai jamais très bien parlé d'ailleurs). Signe d'avoir passé 8 mois à l'étranger. Si nous tenons en compte que pendant les deux derniers mois, mes relations intimes avec la langue de Molière se limitaient à de pauvres échanges pratiques avec quelques touristes égarés, il est normal que Shakespeare, après nos rapports profonds, débarque dans ma vie francophone à la recherche d'une pension alimentaire.
Isn't it?Venons en aux conlusions de l'espérience Brightonaise. Je diviserai Albion 09 en trois parties. La période Club Med; La période Horror Hotel; La période Polonaise.
La période Club Med s'est déroulée entre notre arrivée (10 février) et le tour de UK, les premiers jours de juin. Après quatre jours à l'auberge, je trouve et confirme une chambre dans une maison victorienne située au bout de
London Road. Le nom de cette rue est devenu, avec le temps, un adjectif pour qualifier un certain type de personnes. Junkies, SDF, âmes sans dents qui déjeunent avec une Foster's. Une rue où les mères ont 16 ans. Où les crachats et les insultes sont un sport national. Où la grande messe se trouve dans la maison Ladbrokes. Bref, l'Angleterre profonde, celle qui a fait tatouer
"Mum & Dad" sur ses avant-bras, celle qui porte fièrement le maillot de son équipe de foot favorite. Mais ils ne sont pas méchants. C'est toujours mieux que de se promener du côté de la Porte d'Anderlecht.
Cette période est appelée "Club Med" parce que c'était les vacances. Nos enchainions les sorties (atteignant le
Big Seven, sept jours de sorties de suite, médaille svp) et les journées de glande (rebaptisées "SS" pour
Stinky Sunday). C'est pendant cette période que j'ai trouvé, un peu par hasard, mon job sur le Pier de Brighton. Et pour bien commencer, le marathon d'
Eastern (Pâques version UK). 12 heures de travail par jour pendant deux semaines. Sur les rotules que j'ai fini, mais avec un compte en banque me permettant de survivre encore quelques temps. Survivre et voyager.
Nous ne pouvions pas passer huit mois dans le Royaume Uni et ne s'en tenir qu'à Brighton, Portsmouth et Londres. C'est pour cela que Christelle et moi décidâme d'entreprendre un tour de UK, en bus. La quintessance de la survivor attitude. Liverpool, Manchester, Glasgow et Édimbourg en cinq jours. Nous sommes rentrés épuisés mais nous pouvons, depuis, rayer une zone de la carte du monde.
Cette période Club Med n'a pas été positive pour mon anglais étant donné que je passais 3/4 du temps à parler français ou espagnol. Cela me laissait un gout amer.

Cette amertume s'est convertie en huile sur le feu frigorifiant de mes tourments. C'est la phase Horror Hotel (du nom du pathétique train fantôme du Pier). En revenant du
Trip Around The UK, je me suis retrouvé sans Internet à la maison. Une occasion parfaite pour réapprendre à vivre sans la toile. Le problème est de vivre sans le net quand on doit organiser sa vie à moyen terme. Pendant le mois de juin, j'ai commencé à me préoccuper, ensuite à m'inquiéter pour finir par m'alarmer sur ce que je ferais en septembre. L'option d'un Master à Valence s'éloignait poussé par les vents de la bureaucratie. Dans ma phobie du temps qui passe, l'idée de perdre une année me rendait fou. Mon anglais faisait du surplace, je commençais à tenter d'esquiver la confrontation avec la langue. Ma vie sociale stagnait. J'étais comme un bateau coincé dans un banc de sable. C'est stable mais ça n'avance plus. Si à tous ces ingrédients on ajoute la lecture de la bio de Pete Doherty qui a alimenté mon gout pour l'autodestruction (gout inhérent à l'être humain by the way), le résultat est une belle compote dépressive comme je n'avais plus savouré depuis des années.

Cette période s'est stoppée net le 10 juillet grâce à un mail m'annonçant que les formalités administratives sont réduites au minimum pour un Master à l'Université de Barcelone. Je reprends espoir, confiance et entre dans la période Polonaise.
La haute saison vient de commencer et je travaillerai en tant que full-time. Les possibilités de parler français sont maintenant supprimées et une nouvelle vague de travailleurs arrive. La grande majorité sont polonais mais aussi quelques anglais venus pour essayer de palier les effets de la crise sur leur portefeuille. Je récupère Internet et les procédures pour le Master s'accélèrent à grands coups de mails ultra-motivés. Les méchantes du travail (les supervisors) créent parmis les travailleurs un rapprochement et nous finissons par devenir une grande famille. On commence à passer du temps ensemble hors du travail. Parfois beaucoup de temps et peu d'espace. Mon anglais a pris la vitesse de l'Eurostar et je suis soulagé que l'aventure britannique finisse sur une note positive. Un signe clair de cette nouvelle situation, l'apparition de la Pologne dans la liste des pays à visiter. Car comme j'aime le dire, un voyage n'est bon que si un autre en découle.
(rédigé dans l'Eurostar du retour le 02-09-09)